C'est curieux la vie quand même…
Je me faisais cette remarque hier soir, encore en prise avec mon Moi psychique qui ne me laisse en paix que quand son alter-ego physique demande de la nourriture en quantité impressionnante.
C'est curieux, dans le sens ou parfois, même si on se dit que l'on ne devrais pas se prendre la tête avec des questions sans réponse, on ne peut s'empêcher d'y penser encore et encore sans cesse, jusqu'à ce que le sommeil vienne vous prendre par surprise et vous faire oublier le temps d'un battement de cil vos préoccupations.
Hier soir donc, la question à 15000€ était la suivante. Sommes nous, quelque part, prédestinés à vivre ce que nous vivons? Vaste question.
D'un côté, croire au fait que nous suivons une ligne définie, écrite quelque part par quelque chose, qu'on appelle cela Dieu ou Nature ou n'importe quoi d'autre, a quelque chose de profondément rassurant. Croire au Destin, être persuadé au fond de soi que notre vie a un but précis, même si nous ne le connaissons pas – encore – c'est d'une certaine façon dissimuler totalement le concept selon lequel nous serions ici par le fruit du plus grand des hasards, perdu dans l'immensité d'autres êtres suivant eux-aussi un cours totalement chaotique. Je crois que cette idée me fait peur, non pas parce que ce serait dommageable d'avoir une liberté totale d'action sur sa vie, mais parce que ça vous amène à un niveau de responsabilité que j'ai beaucoup de mal à envisager.
Quand quelque chose de fâcheux – ou d'heureux d'ailleurs – découle de vos actions, vous vous dites "ça devait arriver", "de toutes façons personne n'aurait pu prévoir"… N'est-ce pas là une forme de déresponsabilisation pure et simple? D'un autre côté, abandonnons un instant l'idée qu'il puisse y avoir une quelconque influence externe sur la façon dont nous gérons nos actes. Comment tenir le choc quand un événement dramatique survient et que vous y êtes mêlé?
Les exemples sont légions. Vous êtes impliqué dans un accident de la route, une personne perd la vie au cours du désastre. Si quelque part au fond de nous même un sentiment même ténu de "je ne pouvais pas l'éviter" n'apparaissait pas, comment continuer à vivre en prenant pleinement conscience de notre responsabilité?
Quelque part, je reste convaincu que nous avons besoin, plus ou moins selon les caractères et les personnalités, de croire que quelque chose de plus puissant que nous-même veille sur nos vie, et ce dans un soucis de "survie psychologique".
Mais croire totalement au Destin, dans ce sens de déresponsabilisation de nos actes, et tout aussi dangereux pour nous-même… C'est d'abord une barrière fermée à toute vie en société. Car vivre en société, je l'ai appris maintes fois à mes propres dépends, c'est accepter ses responsabilités aux yeux des autres. Exister en tant qu'être indépendant. Nier toute responsabilité ne revient-il pas à nier sa propre existence dans un état autre qu'un simple outil? Qu'est ce qui nous différencie d'un marteau ou d'une machine si ce n'est ce pouvoir que nous avons en nous de modifier le cours des choses, d'interagir avec les autres et de voir nos actes avoir des répercussions directes ou indirectes sur leurs propres vies, et cela sur la simple décision de faire ou ne pas faire, de dire ou ne pas dire certaines chose à un moment donné?
Alors que faire. Se laisser porter par les évènements en se gardant de commettre une action qui pourrait se révéler irréparable, et devenir ainsi un esclave, un outil, à la disposition de ce mystérieux Destin, ou bien vivre en tant qu'être totalement indépendant, s'affranchir de toute barrière au niveau des possibilités qui nous sont offertes, mais aussi de la protection offerte par ce potentiel Destin?
Quelqu'un m'a dit un jour que tout problème avait sa solution, que quelque part chaque question avait une réponse. Alors j'ai la haine. La haine contre tout ce qu'on a tenté de me faire admettre, la haine contre cette prétendue science qui envoie des hommes sur la lune mais qui est incapable de répondre à une question aussi fondamentale que celle-ci.
Peut-être, finalement, la réponse se trouve-t-elle en chacun de nous. Peut-être la seule façon de vivre, de survivre en ce monde est d'occulter au quotidien ce genre de questions…
Chacun est libre de choisir sa voie. Destin? Pas Destin? Curieusement, la place la plus envieuse est peut-être l'indécision. Cette faculté de pouvoir faire abstraction de cette question quand la situation le nécessite, et ainsi pouvoir agir dans le bon sens – ou plutôt ce qui nous apparaît comme étant le bon sens – mais savoir se déresponsabiliser pour sa propre survie quand c'est nécessaire. J'envie ceux qui savent le faire. Peut-être ne le saurais-je jamais.
Peut-être, en conclusion, le seul véritable intérêt de cette problématique, au sens où cela fait de nous un être humain un peu plus accompli, est de se l'être un jour posé…